Le Tirailleur Républicain

Le Nouveau Christianisme de Saint-Simon

Pour parfaire sa culture politique, le Tirailleur a décidé il y a peu, d'entamer la lecture d'un ouvrage très célèbre, d'un théoricien mythique, qui aurait dit-on, prophétisé le socialisme.

 

Il s'agit de Saint-Simon à travers le Nouveau Christianisme.

Tout d'abord, un petit pitch de l'auteur. Claude Henri de Rouvroy de Saint-Simon (1760-1825) est un cousin éloigné du plus célèbre mémorialiste de la cour de Louis XIV et de la Régence. Idéaliste, ce jeune ariostocrate s'engage avec La Fayette dans la Guerre d'Indépendance des Etats-Unis d'Amérique. Revenu en France, il est très attiré par les sciences et la philosophie. Durant l'Empire il fréquente les "Idéologues" et fonde avec eux une doctrine prônant le progrès scientifique et social. Il travailla notamment avec Augustin Thierry, Auguste Comte et Léon Halévy à l'élaboration de ce qui sera un jour le "Positivisme"... . Ces oeuvres majeures sont Le politique en 1819, L'organisateur en 1820, et enfin il laisse un texte inachevé à sa mort en 1825, Le Nouveau Christianisme. C'est surtout après sa mort que ces oeuvres connurent un grand succès, et de sa philosophie on créa le "Saint-Simonisme"... .

Le Nouveau Christianisme, court texte d'à peine 84 pages, peut se résumer en une simple citation, qui, répétée à une cinquantaine de reprises, contient en fait toute la doctrine de ce nouveau christianisme : "Le véritable christianisme commande à tous les hommes de se conduire en frères à l'égard les uns des autres" ou encore "la religion doit dirriger la société vers le grand but de l'amélioration la plus rapide possible du sort de la classe la plus pauvre".

Etudions le texte de plus près maintenant.

Il s'ouvre sur une citation de Saint Paul : "Celui qui aime les autres a accompli la loi. Tout est compris en abrégé dans cette parole : tu aimeras ton prochain comme toi-même."

Suis alors un "Premier dialogue" (et unique en fait...) entre deux personnage : le Conservateur et le Novateur. D'emblé le dialogue débute par cette question :

_"Croyez-vous en Dieu ? "demande le Conservateur.

_ "Oui, je crois en Dieu" répond le Novateur.

Puis il précise qu'il faut distinguer les paroles du Christ et celles de l'Eglise pour introduire son futur propos accusateur sur les membres d'un Clérgé qu'il juge hérétique à plusieurs égards, ce dernier ne respectant pas les principes fondamentaux de la parole du Christ. Enfin il prévient qu'il va exposer sa propre doctrine, qui dit-il, est inspirée par les paroles divines.

Débute alors un exposé intitulé "Des religions", où le Novateur compare sa doctrine à un Nouveau Christianisme, ne cessant de rabâcher par la suite les citations exposées çi-dessus sur l'amélioration des conditoins de vie des plus démunis.

Puis il devient plus précis et entame un exposé sur les méfaits hérétiques de la religion catholique. Il fustige la propention du Clérgé à maintenir sous sa dépendance les laïques pour mieux tirer profit d'eux. Ainsi met-il au banc des accusés la théologie qui ne servirait tout simplement qu'à embrouiller les fidèles et les éloigner des questions fondamentales. De plus il critique les richesses possédées par le Clergé et son Pape et leur volonté cupide d'accroître sans cesse ces richesses. En bref il dénonce le fait que le Clergé exploite ses fidèles dans le domaine économique, alors qu'il devrait veiller à son bien être ! Pour finir il rappèle que l'Inquisition, les Jésuites et les Missionnaires se rendirent coupables d'avoir prôné la violence, et donc d'avoir contredit le commandement de Jésus qui interdisait l'usage de la violence.

La suite de l'exposé s'attache alors à montrer les méfaits de la religion protestante. Mais là, il nuance tout de même en précisant que la Réforme Protestante de Luther est partie de bonnes intentions, mais qui ont été soit dévoyées, soit inabouties. Il légitimise l'action de Luther en montrant que l'Eglise au XVème siècle a abandonnée sa mission spirituelle, pour se consacrer au temporel sous l'action du Médicis Léon X.

Le Novateur répête souvent ses idées, revient tout le temps au même "phrases chocs" et précise sa pensée : "L'objet de mon travail n'est point de rechercher laquelle des religions protestante ou catholique est la moins hérétique; j'ai entrepris de prouver qu'elles l'étaient toutes deux, quoique à des degrès différents; c'est à dire que ni l'une ni l'autre n'était la religion chrétienne; j'ai entrepris de démontrer que depuis le quinzième siècle le christianisme avait été abandonné; j'ai entrepris de rétablir le christianisme en le rajeunissant; je me propose pour but de faire subir à cette religion (éminemment philantropique) une épuration qui la débarrasse de toutes les croyances et de toutes les pratiques supersticieuses ou inutiles".

A la fin de ce dialogue, il redonne la parole au Conservateur et lui demande s'il l'a convaincut. Ce dernier répond que oui, mais demande quelques précisions. Il termine par une diatribe contre l'Europe de la Sainte-Alliance qui a mis à genou Napoléon. Il salue sa volonté de terrasser le César moderne, mais dénonce le nouveau joug militaire qui s'ets abbatu sur l'Europe.

Pour conclure il s'adresse directement aux Princes de l'Europe : "Ecoutez la voix de Dieu, qui vous parle par ma bouche, redevenez bons chrétiens, cessez de considérer les armées soldées, les nobles, les clergés hérétiques et les juges pervers comme vos soutiens principaux; unis au nom du christianisme, sachez accomplir tous les devoirs qu'il impose aux puissants; rappelez-vous qu'il leur commande d'employer toutes leurs forces à accroître le plus rapidement possible le bonheur social du pauvre.".

 

On peut ajouter quelques précisions. Dans sa présentation, comme le signale Michel Volle, Pierre Musso met en garde le lecteur en minimisant l'intérêt de Sain-Simon envers la Religion. Il dit ainsi qu'il vaudrait mieux considérer ce christianisme "régénéré" et "rajeuni" comme une sorte de philantropie post-révolutionnaire. Ainsi "la religion n'est pas supprimée, mais métamorphosée et, du même coup, elle est reconnue comme un fait social essentiel" et il reprend ensuite les propos de Saint-Simon : " On s'est trompé. la religion ne peut disparaître du monde...elle ne fait que se transformer." Michel Volle...et le Tirailleur, considèrent au contraire que la doctrine de Saint-Simon est profondément et sincèrement inspirée du Christianisme, même s'il est vrai qu'une telle posture idéologique (la comparaison constante aux paroles du Christ) est forcément un attout majeur pour convaincre ses lecteurs imbus de religion à cette époque.

Il a semblé impotant au Tirailleur de vous faire connaître et partager les idées de Saint-Simon, qui inspira tous les théoriciens du socialisme. Mais, pour sortir du champs strictement politique, (même si le moment est pourtant propice aux débats d'idées...), on n epeut que saluer les vues humaines de ce grand penseur du XIXème siècle. Cet inspirateur du Positivisme avait pour obcession le bien-être de l'humanitén, et cet aristocrate avait compris que l'on ne pouvait pas laisser sur le bord du chemin la "classe la plus pauvre" aui se trouve être également la "classe la plus nombreuse" de la population. Il ne préfigurait pas pour autant le communisme. Bien au contraire, il prévoyait plustôt une démocratie dirrigée par de grands entrepreneurs, des industriels soucieux avant tout de leurs ouvriers qu'ils devaient considérer comme des enfants à charge. On peut se demander aujourd'hui si les grands entrepreneurs ont les mêmes objectifs humains ?... .

Le Tirailleur a son avis là-dessus... .

 

 

Saint-Simon dans Wikipédia

Le Nouveau Christianisme commenté et analysé par Michel Volle

Saint-Simon et ses oeuvres par le site  Culture&Révolution



26/02/2007
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