Le Tirailleur Républicain

Stalingrad de Antony Beevor : l'ère de la Guerre Totale.

 

Le Tirailleur est de retour, il profite de vacances bien méritées pour vous livrer tout chaud sa "brève" fiche de lecture du best seler d'Antony Beevor : Stalingrad.


Un petit mot sur l'auteur, ancien élève de Sandhurst, le Sait-Cyr britannique, Antony Beevor fut officier de carrière avant de devenir historien et romancier. On lui doit notamment des ouvrages sur la guerre d'Espagne et sur la bataille de Crête. Son ouvrage sur Stalingrad est sortit en France en 1999, et a connu un grand succès dans le monde entier.


La suite de cette fiche ne se veut pas exhaustive, bien au contraire, il s'agit ici de « raconter » l'histoire de la bataille qui changea le destin du monde au travers de divers éléments, souvent d'anecdotes frappantes qui témoignent bien de l'immense âpreté des combats pour « la ville de Staline » !


Fin 1942, Hitler est obsédé par la prise de cette ville situé à un endroit stratégique, au bord de la Volga (son ancien nom était Volgograd). Elle devait servir d'appui et de base arrière pour les troupes qui se dirigeaient plus au sud, vers le Caucase et ses puits de pétrole. Dans le même temps, Staline se refusait à perdre cette ville symbole de son régime. Donc « Plus un pas en arrière ».

Durant l'été 1942, le Groupe d'Armées Sud de Von Bock, lance sa grande offensive, dans ce dispositif, la Sixième Armée joue un rôle mineur. Elle est commandée par un officier d'état major, talentueux mais peu expérimenté, le Général Paulus. Son armée était forte d'environ 300 000 hommes, et composée de plusieurs nationalités, Paulus avait donc sous ses ordres des autrichiens, des croates, des hongrois, des roumains quelques centaines d'italiens, et d'innombrables troupes « cosaques », des « hiwis », c'est à dire des soviétiques « retournés » contre l'Armée Rouge. Fin aout, Paulus arrive aux abords de la ville. Cette dernière avait préparé des défenses au cours des mois précédent, à l'image de Moscou fin 1941. De nombreux civils s'étaient « engagé » dans des régiments de milice patriotique. C'est un épisode « effarant » que l'écrivain Vassili Grossman a raconté à ce propos, et je ne résiste pas à tentation de vous le faire partagé .

Le 2  août, 1942, la ville de Stalingrad est rayée de la carte par la plus grande opération de bombardement massif du Front Est jamais menée. Sous les ordres de Richthofen (celui de Guernica, le neveu du « Baron Rouge» de la Grande Guerre) 1200 appareils rasent la ville. Ce même jours, les divisions blindées de Paulus avance et écrasent toute résistance, y compris cette batterie anti-aérienne uniquement composée de jeune volontaires féminines à peine sorties du lycée...qui résistait héroïquement aux Stukas et aux chars de la 16ème Panzerdivision. C'est la 1ère page de gloire de la défense de Stalingrad. Il règne alors une atmosphère dantesque chez les soviétiques, et les civils sont en première ligne dans ce qui se voudra quelques mois après, être une « Guerre Totale ». Ainsi on placarde dans toute la ville ceci : « Nous ne rendrons jamais notre ville natale. Barricadons toutes les rues. Transformons chaque quartier, chaque pâté de maison, chaque immeuble en une forteresse imprenable »...mais cela n'évite pas la panique et les désertions se font jours.

Pour combler les pertes, on enrôle les ouvriers de la ville dans des bataillons spéciaux, pire, dans une usine de fabrication de T-34 aux abords du front, des volontaires sautaient directement dans les chars en fin de montage et partaient au combat quelques centaines de mètres plus loin, sans avoir eu le temps de monter des viseurs, et pour pointer, le tireur était obligé de regarder à l'intérieur du tube du canon. Ceci explique pourquoi, malgré leur qualité intrinsèque, les chars russes tombaient comme à Gravelotte devant les panzer ! Craignant la débâcle, les commissaires politiques réprimaient très sévèrement les tentatives de désertions. Certains reprenaient l'antique méthode romaine de la décimation : passant devant ses troupes, pistolet au poing, un général de division soviétique abattit d'une balle en pleine tête un homme sur dix...pour l'exemple !

L'Etat-Major soviétique

Vient le mois de septembre 1942, « le temps c'est du sang ! ». Le Général Tchouïkov prend le commandement de la ville et de la 62ème Armée soviétique, il se montrera brillant, déterminé, mais surtout impitoyable. C'est le temps des premiers renforts, en particulier la venue des divisions sibériennes. Ainsi, du côté soviétique aussi diverses nationalités étaient réunis... .

Des asiates

Toujours pour contrecarrer le défaitisme, pour dissuader les déserteurs et pour « mobiliser les esprits », tous les moyens de propagande étaient les bienvenus. Ainsi pouvait-on lire ceci courant septembre dans le journal du front de Stalingrad, au bas d'un dessin montrant une jeune fille ligotée : « Et si la fille que vous aimiez était ligotée ainsi par les fascistes ? Ils la violeraient d'abord puis ils la jetteraient sous un char ! Avancez, vous, les guerriers ! Tirez sur l'ennemi ! Votre devoir est d'empêcher l'agresseur de violer votre bien-aimée ! ». Inutile de vous dire que cette propagande axée sur le thème du viol contribua de façon non négligeable aux atrocités commisent par les « ivan » (surnom du soldat russe) lors de l'avance de l'Armée Rouge en territoire allemand fin 44 et en 1945 ... .

Plan de la ville


Toutefois cette propagande devait porter ses fruits, et insuffler cet esprit de résistance et de don de soi hors du commun chez les soviétiques. Aussi, devant les multiples offensives allemandes, les soldats soviétiques se donnèrent corps et âme pour faire barrage à l'envahisseur, et ce n'est pas qu'une image... . En témoigne cette statistique effrayante : durant les 24 premières heures de son engagement, la 13ème division de fusiliers, ayant traversé la Volga sous les tirs allemands (cf Stalingrad de Jean-Jacques Annaud), perdit quelques 30% de ses effectifs, mais réussit à enrayer l'avance ennemi, préservant une petite partie du rivage ouest (l'objectif allemand état de repousser les troupes soviétique de l'autre côté de la Volga, il n'y réussirent jamais...).

Les épaves jonchent les ruines

Durant cette période, la luftwaffe, profitant de sa supériorité, effectua un travail titanesque, et les stukas ne tardèrent pas à devenir les pires ennemis des soviétiques au sol. Un pilote calcula qu'il avait effectué environ 228 sorties au cours des trois dernier mois, soit autant que durant les trois années précédentes (Pologne, France, Angleterre, Yougoslavie) !!! Les exemples de défenses héroïques, dès lors, se multiplièrent comme celui de « la maison Pavlov » fin septembre. Là, une section du 42ème rgt de la Garde devait résister sous le commandement du sergent Pavlov et avec l'aide de quelques civils, aux hordes fascistes et à leurs panzers dans un petit immeuble de 4 étages du secteur industriel (les connaisseurs de Call of Duty s'en rappellent encore, mais oui, cette maison où il faut résister à des dizaines de boches et éliminer 4 chars au fusils antichars...c'est la maison « Pavlov »!). Ce sergent fût couvert de médailles, élevé au rang héros de l'Union Soviétique, et devint ultérieurement...l'archimandrite Cyrille d'un monastère!!!).

La maison "Pavlov"...et Pavlov

Cependant, le service de la patrie nécessitait souvent une contre-partie...pour se donner du courage, les « ivan » percevaient journalièrement une ration de vodka. Il arrivait très souvent que cette ration ne fût pas assez importante, notamment pour les hommes étant au front, et ces derniers usaient alors de divers procédés peu légaux pour subvenir à leurs besoins. Divers trafics furent organisés, mais le NKVD veillait au grain, et par exemple, deux pauvres trafiquantes de vodka furent condamner à dix ans de goulag. Autre petit inconvénient avec les trafics...les décès inopportuns de soldats ayant consommé des vodkas frelatées... .

Un général de division et sa téléphoniste


Poursuivons sur le doux thème de la répression de la part des autorités soviétiques... . Beevor démontre le fait qu'à plusieures reprises, le gouvernement soviétique s'est montrée presque aussi impitoyable envers ses propres soldats qu'avec ses ennemis. On dénombre ainsi près de 13500 exécutions "officielles" durant la bataille de Stalingrad. Les blessures volontaires, les automutilations, les désertions, les infractions au règlement, les oublis étaient très sévèrement punis. Même des soldats accompagnants des amis bléssés à l'arrière, furent fusillés pour abandon de poste! Les chanceux, eux, étaient envoyés dans des bataillons disciplinaires d'où ils n'avaient quasiment aucunes chances de revenir en vie, la mortalité y approchant les 95%! ne parlons même pas des directives de Staline prévoyant de constituer une seconde ligne lors des assauts. Celle-ci, essentielement composée de commissaires politiques, étaient charger de mitrailler ceux qui battaient en retraite. Tous les soviétiques qui étaient fait prisonniers, étaient considérés comme déserteurs... .

Dans le même ordre d'idée, mieux valait ne pas s'approcher trop près de la Volga pour les jeunes « orphelins » de la ville. En effet, bon nombre d'enfants étaient employés par les allemands pour de petites tâches, du genre ramener de l'eau aux soldats. Tout le monde se souvient du petit « sasha » du film de Annaud et du petit russe du Stalingrad allemand de Joseph Vilsmaïer. En effet des centaines d'enfants se débrouillaient pour survivre dans cette ville en ruine, bossant un coup pour les allemands, un coup pour les soviétiques (bon nombre étant d'ailleurs des informateurs). Et bien, il ne faisait pas bon s'approcher de trop près de la Volga pour aller chercher de l'eau, car les soviétiques les abattaient, préférant sacrifier des enfants pour assoiffer leurs ennemis.


Une des éléments caractéristique des tactiques de combat de la Wehrmacht au début de l'offensive Barbarossa, a été d'éviter à tout prix les pertes sanglantes et inutiles qui pouvaient avoir lieu lors de combats urbains, elle se contentait en effet le plus souvent, d'encercler l'ennemi pour l'anéantir. Pourtant, Hitler dérogea à cette règle et ordonna qu'on prenne Stalingrad, qu'on l'investisse rue par rue, maison par maison. Ce fût là une faute grossière. Même si la qualité des troupes allemandes leur permettaient d'envisager la victoire, les ressources immense des soviétiques, leur potentiel humain devait leur permettre de résister et de saigner à blanc la Wehrmacht. Mais il ne faut pas mésestimer pour autant la qualité des troupes soviétiques, certes on peut l'assimiler bien souvent à de la chair à canon, mais son inventivité fît des merveilles à Stalingrad. Aussi ne peut-on passer sous silence l'emploi des tireur d'élite, comme un des facteur d'usure et de démoralisation majeur pour les allemands. Il réussirent en quelques semaines à terroriser les allemands, si bien que le corps des tireurs d'élites devint malgré lui, un élément de propagande...et l'exemple le plus connu est celui du célèbre sibérien, le « lièvre » Vassili Zaïtsev. Ces tireurs avaient recours à diverses ruses pour piéger leurs proies comme par exemple des réseaux de « marionnettes » qui devaient  faire se découvrir l'ennemi à la vue de soldats arborant un drapeaux blanc par exemple, les soldats allemands ne pouvant s'empêcher de se lever et de crier « komm komm » au mannequin ... . Danielov lui, creusait deux tranchées parallèles à la sienne, il y disposait des mannequin habillés en soviétiques, et les faisait « bouger » à la vue des allemands (un peu comme dans le film de J.J. Annaud). Leur bilan avait de quoi affolé l'Etat Major allemand, en effet, un certain « Zikan », à lui seul, obtenait un tableau de chasse de 224 allemands à la date du 20 novembre !

 


Fin novembre, les forces de l'Axe s'enlisent dans des combats coûteux et sans réels résultats à Stalingrad. Ils n'arrivent pas à percer le front. De plus, Hitler se refuse obstinément à changer de tactique. En effet, entre temps, le combat pour Stalingrad a quitté le champs militaire et stratégique pour investir le champ politique. La bataille était devenue le symbole du combat contre le bolchévisme et pour la survie de la race allemande, Goebbels commençait à « inventé » maints qualificatifs pour masquer l'enlisement. De son côté, Staline ne décolérait pas contre ses généraux, les accusant de traîtrise et ou de défaitisme, alors qu'il était le seul vrai coupable de négligence. Au quartier général, la Stavka, Joukov commença alors a élaboré un vaste plan de contre attaque qui devait à terme, encercler la Sixième Armée de Paulus : l'opération Uranus, et finalement, malgré les rétissances de Staline, son plan est accepté. Le 19 novembre, le flanc gauche de Paulus défendu par des troupes roumaines sous-équipées, est ensevelit sous les obus de plus de trois cents pièces d'artillerie lourde, tandis que le flanc droit de Paulus se repli en bon ordre devant la 64ème Armée soviétique.

L'attaque des T-34 lors de l'opération "Uranus"

Mais le piège de Joukov s'est refermé, la 6ème Armée et des reste de l'Armée roumaine sont encerclés dans la poche de Stalingrad, qui devient selon l'appellation allemande un chaudron, le « Kessel » de Stalingrad. Les soldats de la Sixème Armée, bien que très fortement affaiblis, ne s'alarmèrent pas de suite, ils étaient en effet persuadés que leur Führer les sortiraient de ce mauvais pas, d'ailleurs le mot d'ordre du jour le 27 novembre se terminait par « Tenez bon ! Le Führer nous sortira de là! »... . Mais les revers s'amoncelèrent, et le mois de décembre vit se produire l'effondrement de la Luftwaffe de Georing, le Kessel devenant une « forteresse sans toit ». Ainsi, le mauvais temps, les pertes et la supériorité aérienne soviétique empêchèrent la Luftwaffe de ravitailler convenablement le Kessel, provoquant l'affaiblissement physique des troupes de Paulus.

Le plan d'encerlement

Dès lors, de multiples demandes de retraites furent formulées par les généraux pris au piège à Stalingrad, mais Hitler se refusa toujours a envisagé un recul. De plus, des rivalités se firent jours entre ces généraux, certains prônant la rébellion contre le Führer, d'autre continuant à lui obéir aveuglément. Et Paulus dans tout cela ? Et bien ni l'un ni l'autre. A partir de décembre il tomba malade, et fît souvent preuve d'inaction, ou dumoins d'indétermination, se reposant sans doute sur son adjoint, un fidèle de Hitler, le Général Schmidt. Etant « obligé » de réagir et de redonner espoir aux encerclés, Hitler nomma Manstein comme commandant du Groupe d'Armée du Don, nouvelle dénomination du Groupe d'Armée Sud. Ce Général de blindé, le plus brillant stratège de la Wehrmacht, aux ascendances juive soudainement oubliées, élabora un plan de sauvetage de la Sixième Armée. On se mit alors à espérer au sein du Kessel...  « der Manstein kommt » disait-on ! Mais, n'ayant que peu de forces fraîches, cette opération échoua. Le Kessel était condamné à verser son sang pour l'Allemagne ! Il s'agissait alors de retarder l'échéance et d'éviter à tout prix la reddition.


C'est le début de la lente agonie de la Sixième Armée, et aucun maux, aucune plaies ne lui sera épargnée. Pour faire face aux manque de ravitaillement, des mesures drastiques de rationnement furent misent en place, et les premiers à en souffrir furent les « hiwis » et les alliés roumains. La tambouille quotidienne était constituée de « Wassersuppe », soupe à l'eau où flottait de rares morceaux de viande de cheval. Quand par miracle, le ravitaillement arrivait, il fallait faire très attention, et ne pas engloutir trop de nourriture en peu de temps car l'on risquait de mourir sur l'heure dans d'atroces souffrances, l'estomac n'étant plus habitué à l'abondance. En janvier, le pain devint si rare, qu'il était surnommé "Eisbrot", pain de glace tellement il était durci par le gel. En outre, la vermine pullulait, les soldats étaient infestés de poux ce qui fait dire à l'un d'eux d'en une lettre à sa famille :  « Les poux sont comme les russes. On en tue un, et on en voit dix apparaître à sa place ». Dans le même style un soldat signala que des souris avaient « dévoré deux de ses orteils gelés » lorsqu'il dormait. Des situations grotesques se produirent. Ainsi, le Kessel manquait cruellement d'essence, et un officier constata avec ironie qu'on leur avait livré le 26 décembre pour dix tonnes de sucrerie (Noël oblige)...et pas de carburant ! Pire, des intendants trop zélés gardèrent jalousement des entrepôts pleins de vivres dont les soviétiques s'emparèrent intacts (le film de Vilsmaïer le montre bien). D'autre part, leur moral était aussi affecté par la propagande soviétique, qui utilisait des allemands anti-fascistes comme Walter Ulbricht le futur Président de la RDA, chargés de rédiger des textes qui étaient ensuite lus par des « crieurs » aux abords des lignes de fronts.

Mais ces efforts de propagande ne portèrent pas leur fruits. En effet, c'est surtout l'inaction du Führer qui provoqua le mécontentement et l'incompréhension de nombreux officiers de la Wehrmacht. Aussi, fait inédit jusque là, le 15 janvier, un bataillon entier de la 295ème InfanterieDivision se rendit, suivit de peu par un autre bataillon de la 305ème InfanterieDivision. Leurs commandants furent il est vrai, rassurés par les tracs soviétiques qui leur promettaient d'être bien traités, mais il reprochaient surtout à leur Haut Commandement une inaction coupable et meurtrière : « Je ne pouvais rien faire pour mes hommes et je n'osais plus les regarder en face. Partout dans notre régiment, j'entendais les soldats parler de leurs souffrances par la faim et par le froid. Chaque jour, notre médecin devait accueillir des douzaines d'hommes aux membres gelés. La situation était si catastrophique que j'ai considéré que la reddition était la meilleure solution ». Ainsi ces vieux officiers prussiens, imbus de discipline et d'honneur, trouvaient ici la force morale de désobéir à un ordre capital, « ne pas se rendre », car il se rendaient compte de l'absurdité et de la folie des décision de Hitler, dommage qu'ils ne soient pas redescendus sur terre avant... .


Cette période est aussi celle de l'héroïsme pour les allemands. Ainsi, le Général Jaenecke rapporta cet événement : « Une attaque menée par 28 chars russes près de la gare de Bassagino a été bloquée par un lieutenant nommé Hirschmann, servant entièrement seul un canon antichar. Il a détruit, au cours de cet engagement, 15 T-34 ». Cependant on commençait déjà a « rapatrier » certains éléments jugés comme essentiels, ou plutôt des officiers pouvant « resservir » assez rapidement. Des mesures d'évacuations furent prise fin janvier : quelques hommes par divisions devaient être « sortit » du Kessel, ils devaient selon le rêve d'Hitler, former les embryons des futures divisions d'une « nouvelle Sixième Armée » qui devait renaître après sa mort héroïque annoncée. Les critères étaient à la fois fantaisistes et poignants. Ainsi le Général de blindés Hube se vu charger de remettre une liste d'officier de confiance à récupérer en priorité. En fait on se rendit compte que la plupart des officier de cette liste s'avéreraient être des éléments de la propre division blindé de Hube... . Autre possibilité, l'évacuation du prince zu Dohna-Schlobitten qui fut choisit parce qu'il était l'officier ayant le plus d'enfants. Quant à Paulus...il était « dans un état de désintégration physique et morale ». C'est d'ailleurs sans doute le Général Schmidt qui a envoyé ce message signé du commandement de la Sixième Armée, le 29 janvier, soit la veille de l'anniversaire de l'accession d'Hitler au pouvoir : « Au Führer ! La Sixième Armée salue son Führer à l'occasion de l'anniversaire de sa prise de pouvoir. Le drapeau à croix gammée flotte toujours sur Stalingrad. Puisse notre combat être un exemple pour les générations présentes et futures de ne jamais se rendre dans des situations désespérées afin que l'Allemagne soit finalement victorieuse . Heil mein Führer ! Paulus ». Ce message grandiloquent reflétait l'acceptation du « sacrifice » que la Sixième Armée s'apprêtait à faire. D'ailleurs le jours même de cet anniversaire, Goering, comparant l'armée de Paulus aux spartiates des Thermopyles fit en quelque sorte « l'oraison funèbre » de la Sixième Armée. Goebbels quant à lui, qui parlerait bientôt de « Guerre Totale », s'efforçait de démontrer par son éloquence, que Paulus s'était sciemment laissé enfermé dans Stalingrad pour mieux saigner les hordes bolchéviques. Il faut préciser que le peuple allemand ne fût au courant de l'encerclement de la Sixième Armée que fin janvier...soit 2 mois après de début d'Uranus ! Hitler lui, avait déjà la tête ailleurs, comme ses lieutenants, ce qui le préoccupait avant tout était l'état de l'opinion publique, il se fichait des souffrances endurées par ses troupes. Au contraire il rêvait d'un fin « antique » pour ses guerriers, au fond, un suicide massif ne lui aurait pas déplu.

C'est en tout cas le sentiment qu'on eu de nombreux officiers du Kessel, qui d'ailleurs plaisantèrent sur la comparaison qu'avait osé Goering, eux trouvaient sans doute que leur situation ressemblait bien plus « au suicide des juifs » à Massada... . Le 31 janvier, Hitler créa 4 nouveau maréchaux, parmi eux Paulus. C'était semble-t-il, un cadeaux empoisonné pour Paulus, il aurait dit juste après avoir appris la nouvelle : « Je n'ai aucune intention de me faire sauter la cervelle pour ce caporal bohémien ». Le Général von Seydlitz, qui depuis longtemps était « déçu » par l'inaction de Hitler, décida d'autoriser ses généraux de divisions à prendre la décision de se rendre. Il fût de suite relevé de ses fonctions...et peu après quant il se rendit avec d'autres de ses généraux, des rafales de mitrailleuses les accompagnèrent jusqu'aux lignes russes. Quelques jours après, Paulus accepta une entrevue avec des plénipotentiaires soviétiques...à l'intérieur des lignes russes. On fouilla ses affaires, on lui confisqua un certain nombre d'objets « interdit », comme un ciseaux, ce qui provoqua la fureur de Schmidt qui cria « Un maréchal allemand ne se suicide pas avec une paire de ciseaux à ongles! », mais Paulus, épuisé, n'y prêta pas attention, la Sixième Armée avait cessé d'exister !

Paulus et Schmidt partant en captivité

C'est l'heure des comptes, du bilan dans cette ville que l'on va appelé bientôt la « cité des morts ». Peu de temps après la reddition, des journaliste étrangers furent autorisés à venir constater l'état de la ville. Le journaliste anglais Alexander Werth décrit un paysage apocalyptique où se mêle cratères, vestiges d'usines, corps gelés, casques fracassés, douilles d'obus. Il se demandait comment l'on pouvait survivre dans cet endroit ? Pour ce qui est des troupes soviétiques, le bilan humain est dantesque, dans l'ensemble de la campagne pour Stalingrad, l'Armée Rouge a perdu 1 100 000 hommes, dont presque 500 000 morts !!! Du côté allemands, le compte s'avère un peu plus compliqué, mais on arrive communément à admettre qu'il y eu environ 130 000 prisonniers, 100 000 morts, donc à peu près 500 000 hommes de l'Axe restèrent sur le carreau ! Faire accepter ce désastre au peuple allemand était ardu, et Goebbels prit le parti d'affirmer qu'il n'y eu aucun prisonniers ! Il mobilisa tous les médias et décréta un deuil national. Le communiqué radiophonique du 3 février qui annonçait la reddition disait ceci : «  Du quartier général du Führer, le 3 février. Le commandement suprême de la Wehrmacht annonce que la bataille de Stalingrad a pris fin. Fidèle à son serment, la Sixième Armée sous le commandement du maréchal Paulus, a été annihilée par l'écrasante supériorité numérique de l'ennemi... Le sacrifice de la Sixième Armée n'a pas été vain. Pivot de notre mission historique européenne, elle a tenu contre l'assaut de six armées soviétiques...Ses hommes sont morts pour que l'Allemagne puisse vivre. ». Le 18 février Geobbels organisa un grand rassemblement sur le thème « Guerre Totale, Guerre plus Courte », reproduisant l'appel de 1812 : « Que notre cri de guerre soit : que Maintenant le Peuple se Lève et l'Orage se Déchaîne! ». La défaite renforça pour un temps la détermination du peuple allemand, le mot d'ordre était d'éviter les réjouissances en mémoires des combattants du Kessel. Du côté soviétique, c'était l'heure des récompense. Pour redorer le blason de l'Armée Rouge, pour revaloriser les combattants, on réhabilita d'anciennes décorations Tsaristes, comme l'ordre de Koutousov ou bien la réintroduction des épaulettes (distinction, donc privilège petit bourgeois 20 ans auparavant!!!).

Les prisonniers du Kessel en marche vers leur camps...

Enfin, un dernier mots sur les prisonniers. Sur les quelques 130 000 prisonniers du Kessel et de ses alentours, seuls environs 5 000 revinrent un jours, parfois après quinze ans de détention, dans leurs foyers. Il faut distinguer parmi ces hommes, les officiers, mieux traités mais dont beaucoup ont été jugés et condamnés à des peines de prison, et la masse grouillante des soldats, dont beaucoup périrent à cause des conditions de vie déplorables dans leurs camps de travail. Rien que 8 mois après la reddition, déjà 55 000 hommes avaient périt !!! Pourquoi ? Exécutions sommaires dans les premiers temps, (quasi systématique pour les SS et les tankistes), impréparation dans les camps, surnombre de bouches à nourrir, marches de la mort, l'hiver...mais les soviétique ne faisait en fait que rendre la pareille aux nazi qui laissaient mourir de faim les prisonniers soviétiques. Quant aux généraux, ils se divisèrent en trois camps. Le premier fidèle au Führer, le second gorgé de rage envers les tenant du nazisme qui les avaient abandonné. Ces derniers constituèrent un Comité de l'Allemagne libre (comme Vlassov pour les russes!), mais sans grande suite. Le troisième camps, celui des officiers d'honneur qui, tradition prussienne oblige, refusèrent de pactiser de manière opportune avec l'ennemi tout en refusant aussi d'absoudre le régime Hitlerien. Ce dernier camps, nous dit Beevor, eut à subir nombreux harcèlement de la part des deux autres camps... .

Les deux adversaires qui se sont fait face durant presques six mois, à savoir Paulus et Tchouïkov, eurent des destin bien évidemment différent après la bataille.

Le Général Tchouïkov

 Tchouïkov entra en vainqueur à Berlin à la tête de la 8ème Armée de la Garde, devint chef des forces d'occupation en Allemagne, maréchal de l'Union Soviétique et vice ministre de la Défense sous son compagnon d'antan, Khrouchtchev qui avait été le chef des commissaire politique du front de Stalingrad. Paulus lui, s'installa après sa libération en 1953 en RDA, et mourut en 1957 après n'avoir cessé d'écrire sa version des évènements... .

Paulus et Schmidt los de la reddition

Au final, Antony Beevor nous livre un récit intéressant, qui fourmille d'anecdotes, mais qui est un peu confus et peu organisé. Le Tirailleur recommande toutefois sa lecture, comme un indispensable préalable nécessaire à la compréhension de la bataille qui fit basculer le destin de l'humanité.



25/02/2007
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